Le groupe enseignant VPOD/SSP

Vers 1975, des membres de la Ligue marxiste révolutionnaire et du SP/PSR ont constitué le groupe enseignant VPOD/SSP (note 1) avec d’autres enseignantes et enseignants des POCH, du PdT ainsi que des indépendant.es non-affilié.es à un parti. But initial : agir contre les atteintes aux droits démocratiques des enseignant.es, les Berufsverbot.

A cette époque, les enseignant.es étaient nommé.es pour une période de 4 ans, renouvelable quasi automatiquement. Certain.es enseignant.es ont été contesté.es par les commissions scolaires. Raisons évoquées : pédagogiques. Cela n’était jamais arrivé avant ! En fait, les enseignant.es visé.es étaient des personnes alternatives, critiques, de gauche ou – dans le Jura bernois de l’époque – prétenduement séparatistes.

C’était la période de Cincera (note 2) et du Manifeste démocratique.

Nous avions été très mal accepté.es par la section biennoise de la VPOD qui était très « droitière » et nous considéraient comme des « gauchistes » !

Le groupe enseignant a mené plusieurs campagnes en défense des enseignant.es :

En 1978, une campagne en faveur de la renomination de tous.tes les enseignant.es nommé.es en 1974 et contre la non-renomination d’enseignant.es critiques ou prétendument séparatistes, la non-renomination de professeurs de droit au gymnase économique, la non-renomination de l’instituteur Max Antenen (Arch) et en 1980, la non-renomination de Louis Perret, recteur du gymnase français.

(voir la brèche 220 (24 novembre 1979) page 04 : la brèche 220 (24 novembre 1979) page 04)

En 1978 – 1980, une campagne en défense des enseignant.es au chômage (campagne de recrutement au syndicat, conférences de presse, assemblées publiques, interventions parlementaires …). Les enseignant.es au chômage, surtout les jeunes sortant de l’école normale, ne trouvaient pas de poste, il y avait pléthore d’enseignant.es, et le diplôme était, en 1980, un diplôme cantonal ! A cette époque, les femmes mariées, considérées comme « double salaire », subissaient des pressions pour démissionner ou diminuer leur temps de travail.

 

Le groupe enseignant a soutenu et lancé diverses initiatives cantonales pour « changer l’école » :

  • En 1982, soutien à l’initiative cantonale « Réforme scolaire : encourager au lieu de sélectionner » lancée par les POCH et le PSA. Conçue en termes généraux, elle demandait notamment la création de classes uniques d’observation, la suppression de l’examen de passage au degré supérieur et la suppression des notes de la 1re à la 3e année: 35,5% de oui. La campagne pour cette initiative était menée en grande partie par le groupe es VPOD/SSP et le PS/PSR de Bienne. L’initiative était refusée, mais les 35,5% de oui dépassaient de loin les pronostics.
  • En 1988 – 1990 une double-initiative était lancé par un comité politiquement élargi en vue de restructurer l’école obligatoire : « Introduction du modèle 6/3 » et « Réforme du degré secondaire I (7-9 année) ». But : L’école globale – plus d’intégration, moins de sélection. L’initiative « 6/3 » a passé avec 53,6% oui, la 2ème largement refusée: trop gauchiste !
  • Une autre initiative, revendiquant la réduction des effectifs de classe, était aussi refusée en votation.

Ces revendications à portée à la fois syndicale et pédagogique sous-tendaient une autre école.

Sur le plan professionnel et syndical, il y avait conflit d’intérêts entre les enseignant.es nommé.es à titre « définitif » (FEST = pour 4 ans) et les « provisoires » (PROVI = 1 an, renouvelable). A l’époque, la majorité des membres syndiqué.es du groupe enseignant.es VPOD étaient des « provisoires ».

Sur le plan « politique », le groupe enseignant.es de la VPOD organisait des  interventions publiques, des conférences, déposait des interventions parlementaires, participait à des campagnes politiques.

Au Conseil de ville, les élu.es Sylviane Zulauf (LMR) et Hans Müller (PSR), membres de la VPOD/SSP, demandaient au Conseil de ville de nouvelles places d’enseignant.es, en particulier des cours d’allemand pour étrangers ; revendication alors soutenue par le Conseiller municipal Raymond Glas (PSR) , avec un certain succès.

Les VPOD – « Lehreressen », tous les mercredi chez un membre. Ces rencontres régulières étaient importantes pour la dynamique du groupe.

Sur le plan personnel, les relations entre les différents membres de la VPOD étaient pour la plupart amicales : les gens se connaissaient et s’appréciaient. Mais la situation était parfois plus tendue au niveau syndical, y compris lors des assemblées. La Ligue était ressentie comme défendant une ligne politique plus dure, alors que les PS/PSR, POCH et PdT défendaient une ligne plus conciliante.

Il y avait également des points de vue différents sur le rôle du syndicat au sein des enseignant.es de la VPOD/SSP. Certain.es ne comprenaient pas pourquoi le syndicat devait soutenir des « mauvais » enseignant.es simplement parce qu’ils étaient membres syndiqués à la VPOD. Certain.es membres de la VPOD/SSP se considéraient comme des représentants des intérêts non seulement des enseignant.es, mais aussi des élèves/parents (qui subissaient les mauvais enseignant.es) et voulaient leur donner une voix.

Après la réorganisation de la VPOD avec la formation de groupes professionnels cantonaux, les contacts personnels/syndicaux au niveau local se sont perdus assez rapidement.

Remarques :

  • Nous n’avons pas retrouvé d’archives du groupe enseignant.es VPOD/SSP
  • J’ai rédigé ce texte sur la base de souvenirs de divers.es enseignant.es. et d’un interview de Hans Müller, que je remercie.

 

André Hofer

(note 1) VPOD = Verband des Personals öffentlicher Dienste / SSP = syndicat des services publics

(note 2) En 1976, Ernst Cincera fit la une des journaux lorsque furent dévoilées ses activités occultes de protection de l’Etat. Avec l’aide d’un réseau d’informateurs, ce chasseur de sorcières avait réuni des renseignements sur quelque 3500 personnes, appartenant surtout à des milieux de gauche, jugées par lui suspectes. En tant que président du Groupe d’information Suisse, il mettait ce matériel à la disposition des intéressés de l’économie, de l’administration et de la politique.